Calendaria 2025 - Diana Scultori Ghisi

Diana Scultori Ghisi
Alice Vergnaghi

Laura Zernik

 

Traduzione francese

Rachele Stanchina

 

“La chose la plus étonnante, c’est une jeune fille, nommée Diana, qui engrave d’une façon extraodinaire. Je l’ai vue, elle est très charmante et aimable, ses œuvres sont magnifiques et m’ont stupéfait”

S’il existait une échelle pour mesurer la renommée d’une artiste du seizième siècle, le fait d’ être mentionnée dans l’édition Giuntina des VITE de Giorgio Vasari aurait un poids non indifférent: la présence de Diana Mantuana ou Mantovana dans ce recueil d’artistes est vraiment un fait étonnant. D’après les mots de Vasari qu’on a cité au dessus, la protagoniste de la biographie est tout d’abord “une fille très charmante et aimable”, tandis que, en parlant de Michelange, l’artiste et critique d’art de Arezzo ne nous donne pas d’ indications sur son aspect physique, nous en décrivant seulement les qualités artistiques. Pour une femme, au contraire, le prémier élément de valutation c’est l’apparence physique, puis éventuellement le mérite pour son travail. Dans une optique d’égalité, si l’œil veut sa part, devrait être ainsi pour tous les genres, non seulement pour celui féminin. Cependant, Vasari est fils de son époque et il y correspond sans se poser la question.

Cependant il faut lui reconnaître le mérite d’avoir parlé, dans ses VITE, de Diana Mantuana, une artiste capable de réaliser par la gravure des œuvres précieuses, alors qu’ à l’époque les femmes étaient assujettées à toute une série de limitations qui pouvaient arriver à en compromettre la carrière. On verra comme les limites qu’on lui imposa en tant que femme lui donnèrent moins de possibilités de se faire une rénommée par rapport à un graveur du temps, tel que son frére Adamo par exemple. Mais commençons par le début en partant de son nom. Diana Mantuana (nom qu’elle a utilisé pour signer ses œuvres), est connue aussi sous les noms Scultori et Ghisi. Le premier lui vient de son père, connu comme Giovanni Battista Scultori à cause de la profession qu’il exerçait. Le deuxième, Ghisi, est la conséquence d’un malentendu car dans le passé on avait cru que Diana avait des liens familiaux avec Giorgio Ghisi, un graveur de Mantoue qui se faisait appeller Mantovano. Diana est née à Mantoue en 1547, fille d’art de Giovanni Battista Scultori, natif de Verona, et de Osanna de Acquanegra. Elle savoure le goût de l’art dans l’atelier de son père à Mantoue et en devient apprentie. Selon les reconstructions Giovanni s’ installe dans la ville de Mantoue et devient élève de Giulio Romano. Il collabore avec lui pour les travaux de Palazzo Te en réalisant des stuc. Giulio Romano donne vie à Mantoue à une “nouvelle et bizarre manière (d’après l’appellation de Vasari) laquelle definit les caractéristiques d’une façon originale de faire de l’art. Au cours du XVIIème et XVIIIème siècles cette nouvelle vogue acquiert une connotation négative avec le nom de Maniérisme.

Dans le domaine architectural les traits fondants du mouvement se présentent à travers un langage plus flamboyant et articulé, qui vise à la réutilisation d’éléments de la tradition classique, bizarrement enrichis d’autres décorations. Pour ce qui concerne le domaine sculptural, les corps deviennent plus longilignes et, grâce au mouvement, acquièrent plus de dynamisme. Dans la peinture, la perspective centrale et le décor architectural classique laissent la place à des compositions plus libres, qui représentent des milieux naturels. En plus, on introduit des nouvelles nuances de rose et de violet, la lumière est utilisée soit pour donner une tridimensionnalité à l’œuvre, soit pour en augmenter le caractère dramatique. Au niveau des sujets, on reprends ce qui était à la mode pendant la Renaissance: scènes sacrées, scènes de la mythologie et portraits. Dans ce cas, il ne s’agit plus de mi-bustes ou de poses sur le côté: on préfère représenter une partie du corps plus grande, souvent entourée d’un arrière-plan foncé. Diana Mantuana est considérée une artiste manieriste précisément parce-qu’ elle se forme là où ce courant artistique a du succès, la Mantoue des Gonzaga; en plus, elle se teste dans une technique qui s’était diffusée en Italie justement entre le XVIème et le XVIIème siècle, la technique de gravure en taille-douce.

Vasari lui- même écrit que les fils de Giovanni Battista Scultori étaient devenus talentueux dans la technique de la gravure sur les plaques de cuivre avec le burin. C’est difficile d’établir le lieu et la date de naissance de la gravure en taille-douce en Italie. C’est toujours Vasari à nous donner d’importantes informations à ce sujet, lorsqu’il raconte que, en 1450 environ, les orfèvres de Florence avaient realisé des plaques en argent gravées pour la décoration de différents objets. En conclusion, nous pouvons dire que cette technique, dont Diana Mantuana est une excellente artiste, est née dans les atéliers d’orfèvrerie de Florence et se déplace successivement en domaine artistique, quelle que soit sa diffusion en Allemagne, et qui trouve en Durer son expression la plus importante. On utilise toujours le burin, un outil très difficile à manier à cause de la façon de l’empoigner entre l’index et le pouce. Pour arriver à obtenir une marque nette et corréspondante à l’image que l’on veut représenter, il faut une pratique et une précision continuelles. Les gravures de Diana Mantuana sont surtout realisées au burin et la médaille en cuivre ci- dessous représente au recto son visage et au verso l’outil qu’elle utilisait.

A Mantoue, dans l’atelier paternel qui se trouvait dans le quartier de l’unicorne, Diana reçoit directement de son père des cours particuliers, qui lui permettent d’acquérir les concepts fondamentaux du dessin et de la gravure. Pendant la Renaissance le nombre des femmes qui atteindent aux arts graphiques s’accroît, mais elles ont quand- même des limitations: elles ne peuvent pas étudier le corps humain en vrai et, pour ce qui concerne le dessin, elles ne reçoivent que des notions de base. Cela limite fortement leur possibilité de développer un trait et un style personnels. Surtout dans le cas de la gravure les artistes étaient conduites à une production de traduction, c’est à dire de replique d’ouvrages crées par d’autres artistes. L’artiste principal que l’on peut reconnaître dans les gravures de Diana Mantuana c’est Giulio Romano, comme c’est évident dans l’ouvrage suivant, représentant Latona qui donne naissance aux jumeaux divins Apollon et Diana sur l’île de Délos. En comparant la gravure avec le tableau auquel elle s’inspire, on remarque des différences au niveau de l’arrière -plan: d’habitude Diana modifiait le paysage naturel d’origine.

Mais Diana ne se limite pas aux sujets de la mythologie: elle se rapproche aussi à ceux sacrés en reproduisant les ouvrages de grands artistes. C’est le cas de la gravure suivante, toujour réalisée au burin, dans laquelle elle réutilise La remise des clés de Raffaello Sanzio tout en réinterprétant le fond.

Lorsque Diana s’installe à Rome, elle a la chance de pouvoir se rapprocher et étudier les œuvres statuaires de l’antiquité, vers lesquelles elle montre un grand intérêt et qui deviennent source d’inspiration. Nous en trouvons un exemple ci dessous, représentant Hercule et les pommes d’or.

Comme dit auparavant, la période artistique mantouane est suivie par celle romaine: le déplacement est probablement une conséquence du mariage , en 1567, avec Francesco da Volterra (nommé aussi Francesco Cipriani), un architecte qui travaillait pour la très puissante famille romaine des Caetani et qui obtient en 1579 la citoyenneté de Volterra. Cela explique la présence de la signature Diana Mantuana civis Volterrana dans certains travaux à partir des années quatre-vingt. C’est à Rome que Diana atteint la maturité artistique: ses œuvres obtiennent des appréciations si fortes qui lui permettent de se rapprocher de la cour papale. Le 5 juin 1575 elle reçoit du Pape Grégoire XIII le privilège de signer ses propres plaques, en détenant ainsi la propriété intellectuelle et matérielle, et de distribuer ses gravures de façon exclusive pendant dix ans. Diana Mantuana a été la prémière artiste dans l’histoire de l’art féminine italienne qui a obtenu en concession cette possibilité. On comprend ainsi à quel point la graveur avait bien saisi l’importance de sauvegarder son travail pour en traire la subsistance de sa famille. Les seules sources de profit du couple étaient le travail de Diana et les commandes de son époux, qui étaient elles- mêmes reliées à la capacité de faire apprécier et de promouvoir son œuvre.

Diana se montre vraiment capable de donner plus de visibilité à son époux Francesco: elle reproduit par la gravure les dessins des travaux architecturaux de son mari, lequel, par conséquence, obtient un nombre plus consistant de tâches. Le couple vit dans Via della Scrofa; en 1577 Diana donne naissance à un fils qui prend le nom du grand- père maternel: Giovanni Battista. Un autre événement important dans la vie de Diane c’est l’entrée, en 1580, à l’Académie des vertueux du Panthéon. Les artistes de genre féminin pouvaient y accéder, mais toujours sous des restrictions: leur rôle était limité aux activités sociales et elles ne pouvaient exposer leurs travaux que le jour de la Saint Joseph. Diana Mantouana a su exploiter son talent pour rendre la gravure une profession, aussi bien féminine, réconnue à travers la protection de la propriété intellectuelle et la vente en exclusive des œuvres. Tout cela, malgré les limitation qui touchaient les femmes artistes de cette période, dans leur parcours de formation ainsi que dans l’exercice de leur activité. D’après-moi, un des travaux les plus intéressants de l’artiste c’est le Lunaire, un almanach gravé et réalisé en collaboration avec son prémier époux, tout à fait unique dans sa production.

Les dernières gravures de Diana datent du 1588. On ne connaît pas les causes de l’interruption de son activité artistique. Certains critiques ont pris en considération une forme sévère d’arthrose, tandis que d’autres ne sont pas persuadés par cette supposition. En effet, des ouvrages tels que La Visitation du 1588 sont réalisés avec des traits encore très précis qui sont incompatibles avec une maladie dégénérative comme l’arthrose.

C’est plus probable que, une fois que son époux atteint la prospérité économique, elle arrête de graver. Francesco meurt en 1594 et deux ans après Diana se marie à nouveau avec un autre architecte, Giulio Pelosi. Le couple s’installe en Via del Corso, où Diana meurt le 5 avril 1612. Un grand merci pour la précieuse consultation au professeur Elena Amoriello, enseignante de Disciplines picturales au lycée Artistique “Callisto Piazza” de Lodi. M.me Amoriello est elle- même graveur, responsable du laboratoire de chalcographie du lycée où elle enseigne et transmet cette ancienne et inestimable forme d’art.